L'ornemental dans l'assiette, pourquoi pas? Fleurs comestibles et micropousses
11 juillet 2024
Les fleurs et les micropousses décorent non seulement les plats avec leurs couleurs, mais y ajoutent aussi des saveurs souvent très délicates. Elles peuvent être la petite touche acidulée ou poivrée que vous recherchiez. Mais lesquelles choisir? En effet, plusieurs fleurs se mangent et il est surprenant de constater que bon nombre de nos herbes indésirables (ortie, pissenlit, plantain, renouée du Japon, oseille, etc.1 ) sont comestibles. Heureusement, certaines entreprises sont là pour vous faire des propositions. En voici quelques-unes.
Si vous êtes dans le coin de Sainte-Anne-des-Monts, vous pouvez trouver des micropousses à La Sablonnée, ferme sur mer. Principalement axée sur la culture de plantes potagères et la production d’œufs, La Sablonnée offre différentes micropousses, dont certaines sont vendues en mélange (tournesol, pois, radis, roquette, cresson) et que vous pouvez trouver directement à la ferme et au Marché public de Cap-Chat.
Les Jardins d’Amaryllis, à Gaspé, offrent des abonnements pour des paniers de légumes, et les abonné·es ont de la chance, car on y trouve également des fleurs comestibles de différentes espèces: capucine, calendula, bourrache, ciboulette, etc. L’entreprise joint l’utile à l’agréable avec sa production de fleurs comestibles, qui a pour objectif d’attirer les pollinisateurs dans les champs, au grand bénéfice de sa production maraîchère. Les paniers contiennent aussi des bouquets de différentes herbes (persil, menthe, coriandre, sarriette, ciboulette) qui ajouteront une touche élégante et savoureuse aux plats. On peut se procurer les produits des Jardins d’Amaryllis à leur kiosque libre-service sur place, à longueur d’année, et au Marché public de Gaspé le samedi, pendant la saison estivale.
De la même manière, les Jardins de Forillon, également à Gaspé, produisent tulipes, tournesols, dahlias, zinnias, mufliers, basilic et coriandre, destinés aux restaurants du coin, aux commerces et aux particuliers. Ils offrent des abonnements à des bouquets fermiers en période estivale, qui intègrent des fleurs comestibles. On les trouvera lors des marchés publics de Gaspé et au marché hebdomadaire de la ferme. Fait intéressant : il est possible de leur passer des commandes particulières!
L’entreprise Les Fermes aux champs pourpres, de New Richmond, produit des fleurs comestibles telles que la capucine, le calendula et la pensée, et prévoit diversifier son offre dans les prochaines années. Mais ce qui les distingue des autres entreprises, c’est leur production de lavande, dans les champs derrière la grange. La lavande, c’est aussi une fleur comestible et il est possible de la consommer de différentes manières, fraîche ou séchée, et de manger ses fleurs et ses feuilles. Chaque variété a un goût particulier. Les Fermes produisent deux variétés de lavande anglaise, souvent appelée lavande vraie – la ‘Munstead’ et la ‘Hidcote Blue’ – ainsi qu’une variété de lavandin, le ‘Grosso’. De toutes les variétés, c’est la lavande anglaise qui est la meilleure pour la consommation. Le lavandin est comestible, mais son goût est peut-être un peu moins intéressant, car il est plus parfumé. Suggestion gourmande de Julie Lamoureux, copropriétaire : saupoudrer un gros sel aromatisé à la lavande sur des légumes, comme des asperges, pour les faire griller sur le barbecue. Délicieux! On peut trouver la lavande directement à la ferme ou au Marché public de New Richmond.
Gaspésie Sauvage, de Douglastown, offre à sa clientèle des épices à dessert concoctées avec, entre autres, du mélilot et des pétales de rose. À essayer absolument dans vos préparations de gâteaux, de crêpes ou même dans votre yogourt! L’entreprise, qui récolte des produits sauvages, prépare aussi des mélanges de tisanes avec diverses fleurs (tussilage, fleurs de sureau, roses, etc.). Et plusieurs des fleurs récoltées sont employées par des distilleries locales, provinciales ou même européennes, comme la Société secrète, de Cap-d’Espoir (armoise, épilobe, mélilot) et la Distillerie des Marigots, de Caplan (rose), et par diverses microbrasseries, comme Le Naufrageur, de Carleton-sur-Mer, qui utilise la tanaisie pour sa bière double blanche. Les produits de Gaspésie Sauvage se trouvent sur son site web et dans certaines boutiques, comme le Marché des Saveurs (Montréal et Gaspé).
En saison, La Cabottine – Saveurs indigènes, de Sainte-Angèle-de-Mérici, fournit des fleurs sauvages fraîches aux chef·fes de la place, qui en agrémentent les plats concoctés. Pétales de rose, mauves musquées, fleurs de thé du Labrador, vesce jargeau et impatientes sont autant de fleurs sauvages offertes! L’entreprise, qui fait de la transformation, propose également à sa clientèle des fleurs séchées dans ses mélanges de tisanes forestières, composées de plantes indigènes aussi variées que épilobe, spirée, achillée millefeuille, etc. La boutique en ligne de la Cabottine propose ses produits, que l’on peut entre autres trouver dans plusieurs boutiques du coin.
Le Restaurant Villa Estevan Lodge, situé dans les Jardins de Métis, est un bel exemple de restaurateur qui incorpore des fleurs comestibles dans sa conception culinaire. S’approvisionnant à même la production de fleurs des jardins, le chef Frédérick Boucher travaille avec les fleurs pour ce qu’elles ont à offrir: une saveur en particulier, une couleur précise, une odeur… et modifie ses menus selon les floraisons et les arrivages. «Ma fleur préférée est la capucine, une fleur de couleur rouge ou jaune au goût très poivré et sucré. On utilise la plante au complet: la fleur, la tige et les feuilles. J’adore utiliser les feuilles vertes, au goût poivré, pour remplacer le poivre dans une recette ou pour réaliser un sorbet de feuilles de capucine avec une ganache au panais.» Une autre variété particulièrement appréciée du chef: le tagète, une petite fleur orangée qui rappelle le goût de l’orange amère et qui, selon son conseil, se marie bien avec ce plat de crevettes nordiques, tomates, sabayon au jus de crustacé et huile de tige de tagète (voir la photo ci-dessous).
On vous a présenté quelques entreprises offrant fleurs comestibles et micropousses, mais n’hésitez pas à interroger votre maraîcher préféré. Il a peut-être de ces petits trésors, lui aussi, à vous offrir!
MAIS ÇA GOÛTE QUOI, TOUT ÇA?
Ça y est, vous avez envie de vous lancer, mais vous ne savez pas trop par où commencer… Voici un aperçu du goût de quelques végétaux ornementaux évoqués dans cet article. Ça vous inspirera peut-être une prochaine recette!
On dit des fleurs de bourrache (Borago officinalis) qu’elles goûtent l’huître et que les feuilles goûtent le concombre. On peut les utiliser dans les salades, en limonade ou en infusion.
Les calendulas (Calendula officinalis) ont un goût qui rappelle le safran et s’utilisent bien tant avec des plats salés que sucrés. Autant les pétales que le bouton sont comestibles. Essayez-les avec des plats contenant du riz, des œufs, des sauces…
Quand on pense à la lavande (Lavandula angustifolia), on pense surtout aux infusions et aux tisanes. Mais avec son goût floral, qui peut rappeler le romarin, elle convient aussi à divers desserts, certains plats de viande et, transformée en sirop, elle peut agrémenter les cocktails et la limonade. On la retrouve parfois en confiture et dans les mélanges d’herbes de Provence. Puisqu’elle a un goût prononcé, il vaut mieux l’utiliser avec modération.
Le mélilot (Melilotus officinalis), qui peut être consommé frais, est surnommé la «vanille boréale», car il contient une substance appelée coumarine, diffusant un parfum typique au séchage. On l’utilise comme substitut à la vanille. Il a une petite touche florale avec des effluves d’amandes, de foin coupé et de miel.
Avec leur goût rafraîchissant et sucré, les pensées (Viola sp.) sont parfaites pour manger en garniture ou en salade. On peut les incorporer dans des glaçons pour une touche décorative. Leur petit goût mentholé permet de les utiliser pour remplacer la menthe dans les mojitos et les desserts.
La fleur de tanaisie (Tanacetum vulgare) est très aromatique et se marie bien aux goûts de la sauge, du thym et du romarin. Puisqu’elle a un côté citronné et amer, il ne faut pas en abuser. Elle accompagne les poissons et les plats à base d’œuf, en leur donnant une saveur méditerranéenne.
La fleur de la vesce jargeau (Vicia cracca), herbe dite indésirable, est sucrée et intéressante en garniture de salade.
Quant aux micropousses, celles de tournesol ont un léger goût de noix, un peu sucré, et sont très croquantes ; celles de radis sont poivrées et aussi un peu sucrées ; celles de pois ont un très léger goût de pois ; celles de cresson ont un goût un peu poivré et piquant qui se rapproche de la moutarde; et celles de roquette ont un goût de noix suivi d’une touche poivrée.
N’hésitez plus à ajouter de la verdure et de la couleur à vos plats. Il s’agit de dénicher de nouveaux goûts, de trouver des options pour remplacer d’autres ingrédients et de découvrir de nouvelles combinaisons gagnantes. Les fleurs dans l’assiette, c’est oui, et pas que pour la décoration!
1. Il est important de s’assurer de la non-toxicité des plantes que l’on consomme. En cas de doute, on s’abstient.
PAR VIRGINIE TURCOTTE
Rédactrice en chef
Virginie Turcotte a travaillé dans le milieu éditorial à Montréal une vingtaine d’années avant de revenir s’établir dans la Baie-des-Chaleurs. Devenue horticultrice, elle marie maintenant culture des plantes et culture des mots en offrant divers services liés à la rédaction et à la révision.